L’Afrique du Sud a déposé ses preuves de génocide auprès de la Cour internationale de Justice
par Brett Wilkins
L’Afrique du Sud a déposé lundi 750 pages de preuves «accablantes» selon lesquelles Israël commet un génocide à Gaza auprès de la Cour internationale de Justice de La Haye, aux Pays-Bas, date limite pour soumettre les preuves finales dans le procès en cours.
L’ambassadeur d’Afrique du Sud aux Pays-Bas, Vusi Madonsela, a remis le document juridique, connu sous le nom de mémoire, au siège de la CIJ dans la ville néerlandaise. Selon le règlement de la Cour, le contenu du mémoire ne peut être rendu public pour le moment.
L’ambassadeur d’Afrique du Sud aux Pays-Bas dépose le dossier à charge contre le régime sioniste
Selon un communiqué du bureau du président sud-africain Cyril Ramaphosa, le mémoire est une «présentation complète des preuves accablantes du génocide à Gaza».
Le bureau de la présidence a déclaré que le document «contient des preuves qui montrent comment le gouvernement israélien a violé la Convention sur le génocide en encourageant la destruction des Palestiniens vivant à Gaza, en les tuant physiquement avec un assortiment d’armes destructrices, en les privant d’accès à l’aide humanitaire, en provoquant des conditions de vie qui visent leur destruction physique, en ignorant et en défiant plusieurs mesures provisoires de la Cour Internationale de Justice, et en utilisant la famine comme arme de guerre et pour favoriser les objectifs d’Israël de dépeupler Gaza par des morts massives et le déplacement forcé des Palestiniens».
«Les preuves montreront que les actes génocidaires d’Israël sont motivés par l’intention particulière de commettre un génocide, par l’incapacité d’Israël à empêcher l’incitation au génocide, à empêcher le génocide lui-même et à punir ceux qui incitent et commettent des actes de génocide», a ajouté le bureau de Ramaphosa.
La plainte déposée par l’Afrique du Sud intervient alors que l’offensive israélienne contre Gaza dure depuis 387 jours et a fait, selon les agences palestiniennes et internationales, au moins 43 020 morts, en majorité des femmes et des enfants. Au moins 101 110 autres ont été blessés et plus de 10 000 Gazaouis sont portés disparus ou présumés morts et enterrés sous les décombres de centaines de milliers de maisons et autres structures bombardées. Des millions d’autres Palestiniens ont été déplacés de force, affamés ou malades à cause de l’invasion israélienne et du «siège total» de Gaza.
Ce dépôt intervient également une semaine après que des membres de haut rang du cabinet d’extrême droite du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et des parlementaires se soient exprimés lors d’une conférence prônant le nettoyage ethnique et la recolonisation de Gaza.
Le bureau de Ramaphosa a déploré qu’«Israël bénéficie d’une impunité sans précédent pour violer le droit et les normes internationales depuis que la Charte des Nations unies existe».
«Le mépris constant d’Israël pour le droit international met en péril les institutions de gouvernance mondiale qui ont été créées pour demander des comptes à tous les États», a affirmé la présidence dans son communiqué. «Le génocide flagrant à Gaza est visible pour tous ceux qui ne sont pas aveuglés par les préjugés».
La déclaration de Ramaphosa poursuit :
«La lutte palestinienne contre l’impérialisme, l’apartheid israélien et le colonialisme de peuplement est la réalité quotidienne du peuple palestinien. Depuis 1948, il est confronté à diverses formes de colonisation, souvent soutenues par des puissances coloniales historiques et, plus récemment, par des États déterminés à façonner un ordre mondial dans leur intérêt. La lutte mondiale contre le colonialisme de peuplement se poursuit dans certaines parties du monde, notamment en Palestine occupée, à Gaza et en Cisjordanie. La communauté internationale ne peut rester les bras croisés alors que des civils innocents – notamment des femmes, des enfants, des travailleurs hospitaliers, des travailleurs humanitaires et des journalistes – sont tués simplement parce qu’ils existent. C’est un monde que nous ne pouvons pas accepter».
«Nous réitérons notre appel à un cessez-le-feu immédiat en Palestine, au Liban et dans toute la région, et au début d’un processus politique pour assurer une paix juste et durable», a ajouté le bureau de Ramaphosa.
L’Afrique du Sud a également remercié les plus de 30 pays et blocs régionaux, dont l’Union Africaine et la Ligue arabe, qui soutiennent sa démarche.
La démarche de l’frique du Sud a été largement saluée
Il faudra peut-être des années avant que la CIJ ne rende son jugement dans cette affaire. En juillet, le tribunal a émis un avis consultatif non contraignant selon lequel l’occupation de la Palestine par Israël – y compris la Cisjordanie, Jérusalem-Est, Gaza et le plateau du Golan syrien – est une forme illégale d’apartheid qui doit cesser «aussi rapidement que possible».
Le dépôt du dossier par l’Afrique du Sud est intervenu le jour même où Francesca Albanese, la rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés, a publié un rapport sur le «génocide israélien en tant qu’effacement colonial» en Palestine.
Israël nie avec véhémence commettre un génocide à Gaza, une position partagée par l’administration Biden, principal bienfaiteur du pays.
Les soutiens de la Palestine ont salué le dépôt du dossier lundi et le directeur exécutif national du Conseil des relations américano-islamiques, Nihad Awad, a remercié les dirigeants sud-africains pour «avoir contribué à révéler à la communauté internationale le génocide et les intentions génocidaires du gouvernement israélien d’extrême droite à Gaza».
«Ce dossier détaillé expose également davantage la complicité criminelle de l’administration Biden avec le génocide israélien à Gaza», a ajouté Awad. «Le président [Joe] Biden devrait mettre fin à sa complicité avec le génocide en arrêtant les livraisons d’armes à Israël et en imposant un cessez-le-feu immédiat».
L’administration Biden et le Congrès ont alloué à Israël des dizaines de milliards de dollars d’aide militaire et une couverture diplomatique pour poursuivre sa guerre.
Francis Boyle, professeur de droit international à la faculté de droit de l’université de l’Illinois, note qu’«Israël a violé trois ordonnances antérieures de la Cour» et «a également violé la décision du mois de mai sur Rafah».
«Juste après cette décision, Biden a publié sa déclaration ridicule selon laquelle Israël avait accepté un cessez-le-feu, ce qui n’est manifestement pas le cas», a-t-il poursuivi. «Les manœuvres bidon de «négociations de cessez-le-feu» de l’administration Biden ont simplement donné à Israël plus de temps pour commettre davantage de crimes, y compris la récente annihilation du nord de Gaza».
«Étant donné le manque de respect d’Israël pour les décisions de la Cour, il devient impératif que ces décisions soient contraignantes», ajoute Boyle. «Le veto américain au Conseil de sécurité de l’ONU a empêché cet organe de faire son travail. L’Assemblée générale de l’ONU devrait donc utiliser sa procédure d’Union pour la Paix pour prendre le contrôle de la situation et recommander un embargo sur les armes et des sanctions économiques contre Israël ainsi que d’autres mesures. C’est ce qui avait été fait à l’Afrique du Sud de l’apartheid en raison de son occupation illégale de la Namibie».
source : Commondreams via Mounadil al-Djazaïri
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