par Vincent Lemire
8 août 2025. Cette date restera gravée dans les livres d'histoire: Le jour où le cabinet de sécurité israélien a approuvé le plan d'anéantissement total de la bande de Gaza, le nettoyage ethnique de ses habitants et le sacrifice délibéré des otages encore détenus.
- Le 14 octobre 2023 j'écrivais que "le piège tendu par le Hamas consiste à provoquer Israël afin que son armée commette des crimes de guerre d’une ampleur inédite, jusqu'au retournement de l’opinion publique mondiale".
- Le 2 janvier 2024 j'écrivais "ce n’est plus une guerre pour 'éradiquer' le Hamas, c’est une dévastation volontaire, systématique et délibérée, pour extirper les civils de la bande de Gaza, par la mort ou par l’exode, par la famine ou par l’épidémie".
- Le 22 septembre 2024 je reprenais l'historique des déclarations juridiquement génocidaires proférées par des membres du gouvernement israélien: «Le 23 décembre 2023 le ministre de la sécurité nationale, Itamar Ben Gvir a affirmé que "la seule solution, c’est la déportation massive des habitants de la bande de Gaza" et le ministre des communications Shlomo Karhi a cyniquement précisé que "l’émigration volontaire doit parfois être imposée avant d’être consentie". Quelques semaines plus tôt, Nétanyahou confirmait devant ses partisans l’objectif de réduire la population de Gaza "à son strict minimum", et son ministre des finances Bezalel Smotrich donnait l’objectif chiffré de "100.000 à 200.000 Palestiniens à Gaza" à la fin de la guerre, ce qui supposerait d’en expulser plus de 2 millions. Ces déclarations relèvent toutes de l’"intention génocidaire" telle que définie par la CIJ».
- Le 22 janvier 2025 j'écrivais: «Les suprémacistes israéliens, par la voix du ministre des finances Bezalel Smotrich, exigent la reprise des combats pour "occuper la bande de Gaza et créer un gouvernement militaire", ainsi que l’annexion complète de la Cisjordanie, sa prochaine cible». Et j'ajoutais: «Il faut que les instances juridiques internationales poursuivent leurs enquêtes sur les crimes de génocide imputés au gouvernement israélien et sur les crimes de guerre imputés aux deux parties».
- Tout était donc prévisible et prévu. L'annonce de ce matin n'est pas un tournant dans cette guerre d'extermination, c'est un aboutissement. De ce point de vue le dernier round de négociation a ressemblé plus que jamais à un théâtre d'ombres, avec le Hamas qui proposait à nouveau la libération de TOUS les otages en échange de la fin DEFINITIVE de la guerre et de son désengagement de la bande de Gaza / Netanyahou qui continuait de plaider pour un accord intérimaire, la moitié des otages, 60 jours de trêve et un retrait partiel de ses troupes. Un cessez-le-feu global et définitif était à portée de main, Netanyahu l'a délibérément torpillé. - Qu'est-ce qui peut encore stopper ce plan d'anéantissement ? Car on ne peut pas se contenter de condamner, de hurler et de vitupérer, il faut tout tenter, tout essayer, même si les espoirs sont minces. Il faut agir sur deux leviers, Israël et la communauté internationale.
- En Israël ce sont les soldats qui peuvent tout bloquer. Selon l'armée israélienne le plan d'occupation totale de la bande de Gaza nécessitera entre 6 mois et 2 ans + 4 divisions d'infanterie, alors que les troupes sont épuisées, que les réservistes se présentent de moins en moins nombreux à leur base et que les suicides de soldats se multiplient. La hiérarchie militaire renâcle également. Si le chef d'Etat major Zamir démissionne (pas forcément par probité morale, mais par peur des poursuites judiciaires à l'étranger) il entrainera derrière des centaines d'officiers intermédiaires, et donc des milliers de soldats. En 1982 ce sont les mères de soldats qui ont mis un terme à la guerre du Liban. C'est pour cela que nous avons signé une tribune il y a 3 jours avec Elie Barnavi: il faut continuer d'agir sans relâche sur l'opinion publique israélienne. C'est elle qui fait la guerre, c'est elle qui la finance.
- La communauté internationale a de ce point de vue un rôle crucial pour faire plier les soldats et la hiérarchie militaire, en imposant des SANCTIONS immédiates et paralysantes sur Israël.
a) Sanctions commerciales qui videront les magasins en quelques jours et qui auront un effet immédiat sur un pays isolé géographiquement et étranglé économiquement ;
b) sanctions juridiques en soutenant les mandats d'arrêt de la CPI et en démontrant aux soldats israéliens qu'ils ne pourront plus jamais voyager dans les pays signataires des traités juridiques internationaux ;
c) sanctions diplomatiques en interdisant immédiatement le sol européen à tous les membres du gouvernement israélien ("Schengen Travel Ban").
d) sanctions militaires : L'annonce d'un embargo allemand sur les livraison d'armes à destination d'Israël est un premier pas décisif.
- Il est minuit moins une. Si des sanctions immédiates et crédibles ne sont pas annoncées dans les heures qui viennent, la promesse d'une reconnaissance de la Palestine en septembre prochain sera nulle et non avenue : Emmanuel Macron aura finalement reconnu un cimetière.
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Vincent Lemire sur X.