mardi 11 mars 2025

La pathologie nerveuse et mentale chez les anciens Hébreux



The madness of King Saul


Osée était un érotomane et Ezéchiel un coprophage

Pendant un séjour de deux années passées en Algérie, en 1904 et en 1905, nous avons eu l'occasion d'observer un certain nombre de Juifs arabes présentant des tares nerveuses manifestes (symptômes de neurasthénie, d'hystérie et troubles psychiques).

Seulement, à cette époque, nous étions encore loin de penser au titre de notre thèse et nous ne pensions pas que les observations que nous avaient suggérées ces quelques malades, nous serviraient de point de départ et de thème à notre travail inaugural. Nous avons été frappé des paroles du professeur Charcot, disant qu'il y aurait une étude intéressante à faire sur la médecine nerveuse des Juifs, et c'est à la lecture de ses savantes « leçons cliniques du mardi, de la Salpêtrière » que nos observations personnelles, vieilles de deux ans, nous revinrent en mémoire. [...]

Chez les Hébreux, peuple essentiellement nerveux, les névroses ne devaient pas passer inaperçues. En différents endroits de la Bible, nous trouvons des descriptions qui présentent une très grande analogie avec les phénomènes que nous observons dans l'hystérie. [...]

Il semble que la pathologie mentale ait été mieux observée chez les Hébreux que les névroses et les autres maladies nerveuses.

En effet, dès les temps les plus reculés, la folie fut l'objet de considérations spéciales, car elle était regardée comme une cause d'irresponsabilité. Le premier cas de folie dont parle l'histoire sainte, est celui de David ; on sait que ce dernier feignit d'être atteint de démence pour empêcher Akis, roi de Gad, dont il était le prisonnier, de venger, sur lui, les défaites des Philistins : « Il contrefaisait le fou entre ses mains, et faisait couler sa salive sur sa barbe, et Akis dit à ses serviteurs : « ne voyez- vous pas que c'est un fou ».

Les juristes Hébreux durent, dans l'intérêt de la justice, chercher une définition de la folie. Pour l'obtenir, ils l'établirent, non sur la nature des désordres de l'entendement, mais sur les caractères que la maladie imprime aux actions. D'après le Talmud, un aliéné est « celui qui perd les objets qu'on lui remet, celui qui déchire ses vêtements, celui qui, pendant la nuit, parcourt les lieux solitaires ».

D'après cette définition, les Talmudistes considéraient les fous comme incapables d'agir comme des êtres raisonnables et par conséquent irresponsables de leurs actes.

La première partie de la définition : « celui qui perd les objets qu'on lui confie, qui déchire ses vêtements » désigne incontestablement l'idiotisme. Pour qu'une personne appartienne à cette catégorie, il suffit donc aux Talmudistes qu'elle manque de l'instinct de propreté, qu'elle ne possède aucune adresse manuelle ou que les sensations ressenties par elle soient tellement fugitives qu'elle les oublie aussitôt après leur apparition.

La deuxième partie de la définition vise une espèce de manie consistant à se livrer à des actes réprouvés par les mœurs et les préjugés.

Nous possédons peu de documents à ce sujet, mais la Bible nous apprend qu'Osée était un érotomane et Ezéchiel un coprophage ; que le roi Saül était fréquemment atteint de crises d'excitation maniaque qui engendrèrent, chez lui, une noire mélancolie. Ces accès de fureur subite apparaissaient surtout lorsque son jeune écuyer cherchait à l'amuser avec son instrument, et ils étaient si violents que Saül avait l'air d'un possédé. Il avait des idées de persécution et des impulsions au meurtre et au suicide. On employa, contre cette maladie, un remède dont l'efficacité fut attestée par plusieurs observateurs, et David le guérit en le ravissant par les sons harmonieux de sa harpe.

Les prophètes, qui faisaient œuvre de médecin en soignant les malades, se considéraient aussi comme les instruments de la colère divine. Pour eux, la maladie n'était qu'un châtiment divin, et la foule, qui ne pensait que par les prophètes, admettait, sans réserve, cette opinion. La maladie était donc, très souvent, causée par un démon ; c'était de la possession, de la démonopathie.

Contre les démons, on employait les exorcismes et la prière, les amulettes, les filtres, les conjurations. Les exorcismes les plus parfaits étaient toujours accompagnés de musique. Pour guérir Saül, Samuel lui envoie un joueur de harpe qui calme ses accès...


Docteur W. WULFING-LUER, "La pathologie nerveuse et mentale chez les anciens Hébreux", 1907.