lundi 8 septembre 2025

Flottille pour Gaza : quel rôle de l'Afrique dans ce convoi humanitaire ?


La Global Sumud Flotilla, le plus grand convoi civil jamais organisé vers Gaza, qui devait prendre la mer dimanche depuis Tunis a reporté son départ à mercredi. Médecins, syndicalistes, militants maghrébins et sud-africains y participent, affirmant une solidarité africaine malgré des divisions diplomatiques.




Une dizaine de bateaux s’apprêtaient à quitter Tunis ce dimanche 7 septembre. Mais la veille, les organisateurs ont annoncé avoir reprogrammé le départ à mercredi, pour des "raisons techniques et logistiques". Ils vont rejoindre le convoi humanitaire déjà lancé d’Europe, retardé par le mauvais temps en Méditerranée.

Ce départ depuis l’Afrique du Nord n’est pas un simple relais logistique : il marque une étape symbolique. Pour la première fois, la Global Sumud Flotilla, présenté comme le plus grand convoi maritime civil jamais organisé vers Gaza, embarque une composante africaine d’ampleur.

Plus de cinquante navires au total, venus de quarante-quatre pays, convergent désormais vers l'enclave palestinienne côtière assiégée.

Tunis, point d’ancrage africain

Sur les quais de la Goulette, l’ambiance est déjà celle d’un grand départ. La Tunisie, qui avait vu l’un de ses navires parti de Bizerte pour Gaza attaqué par des drones israéliens en avril, s’affirme comme le cœur africain de cette mobilisation. Trois cents volontaires tunisiens ont embarqué : médecins, syndicalistes, marins, figures de la société civile. Leurs organisations, de l’UGTT à la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, ont fait de la flottille une affaire nationale.

Autour d’eux, les délégations venues d’Algérie, de Libye et de Mauritanie élargissent le front maghrébin. Ce n’est pas la première tentative : en juin déjà, une caravane terrestre partie de Tunis avait essayé de rejoindre Gaza via la Libye et l’Égypte, stoppée par les forces du maréchal Haftar à l’est libyen. Cette fois, la mer doit permettre d’éviter les blocages terrestres.

Normalisation contestée

La flottille réunit aussi ceux qui contestent ouvertement la politique de leurs gouvernements. Une vingtaine de Marocains sont à bord pour dénoncer les accords d’Abraham signés avec Israël. Leur présence illustre le décalage entre Rabat et une opinion publique massivement mobilisée pour la Palestine, comme l’ont montré les manifestations géantes à Rabat cet été.

Ces accords, conclus en 2020, ont marqué la reprise officielle des relations entre Israël et plusieurs pays arabes, dont le Maroc. Mais ils restent impopulaires dans une grande partie de la population. La participation de militants marocains à la flottille traduit ce refus de la normalisation et la volonté d’affirmer, malgré les choix de leurs gouvernements, un soutien direct aux Palestiniens.

L’Afrique du Sud en première ligne

L’autre visage africain fort de la flottille est celui de l’Afrique du Sud. Une délégation conduite par Mandla Mandela, petit-fils de Nelson Mandela, a rejoint Tunis. "Nous avons choisi, en tant que délégation sud-africaine, de rejoindre la Global Sumud Flotilla ici en Tunisie, depuis un point africain, pour dire : l’Afrique fait partie de cette lutte", a-t-il déclaré.

L’engagement sud-africain ne surprend pas. Pretoria compare ouvertement l'occupation israélienne à l’apartheid, et son gouvernement a fait de la cause palestinienne un axe diplomatique. La présence de Mandela petit-fils ajoute un poids symbolique fort : celui d’un héritage de lutte contre l’oppression transposé en Méditerranée.

Menaces israéliennes, espoirs humanitaires

Israël a déjà prévenu : aucun navire non autorisé n’entrera à Gaza. Son ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, a qualifié les participants de "terroristes".

Les organisateurs savent qu’ils risquent l’interception, mais insistent sur la nature strictement humanitaire de leur mission : quarante-cinq tonnes d'aides destinées à une population où l’ONU a déclaré l'état de famine.